Solitude & bande originale (épisode 9)



Ma chambre se trouve en dehors de la maison, adossée à la grange, elle n'est pas très grande. Je me souviens très bien, dès la cinquième, d'avoir écouté en boucle toutes les chansons d'Antoine alors que j'aurais dû faire mes devoirs. Les devoirs, c'est quelque chose que j'ai jamais pu faire. Gérard Manset, Renaud et Antoine étaient le trio chanson française, le noyau dur autour duquel graviteront : Yves Simon, Higelin, Mama Béa Tadiesky et Valérie Lagrange...


Avec la chanson française je me concentre sur les paroles, ensuite vient la musique, ce qui fait que quasiment tous les genres musicaux sont représentés. Le hard rock de Trust, le punk des Garçons bouchers et la variétoche d'Etienne Daho avec l'album Pour nos vies martiennes. C'est d'abord une musique qui s'écoute en solitaire et pour ça une chambre à soi en pleine cambrousse c'est le pied. C'est là que j'écris mes histoires, mes poèmes, que j'écoute ma musique, que je fume mes premières cigarettes et cie.
C'est dans cette chambre aussi que se feront quelques longues parties de Jeux de Rôles. Serrés les uns contre les autres autour de la table. Dans la chambre ou dans la grange à côté ; chez Hervé ou Laurent nous jouons dans le garage. Chez Olivier dans le salon. En fait nous investissons les salons parentaux pour nos parties dès que les parents ne sont pas là. Nous planifions dans la semaine : "Samedi je peux faire un Maléfices... Vendredi on peut continuer la campagne à Warhammer..."

Le Jeu de Rôle que les parents et la télé regardent parfois d'un oeil suspicieux nous a permis de ne pas passer toutes nos soirées à se biturer la gueule comme de vulgaires pochetrons. On ne boit pas quand on joue. Nous en avons passé des nuit dans nos têtes à parcourir des contrées lointaines, à rêver des histoires fabuleuses et abracadabrantes. Grâce au JdR nous bouquinons pour trouver des idées de scénarios ou pour reconstituer le Londres de 1890, le Vienne de 1900, le New York de 1920... Avant les heures passées à jouer il y a les heures de préparation le nez dans la documentation et les constructions scénaristiques, l'élaborations des Personnages Non Joueurs, des univers et des règles du jeu que nous inventions souvent ; les dès à 4, 6, 8, 10, 12 et 20 faces, les Feuilles de Personnages, les paravents derrières lesquels se retranche le Maître du Jeu... C'était un des ciments de l'amitié avec lequel nous nous construisons. 
Pendant les parties la musique sert à relever l'ambiance... Tell Me de Bob Dylan ou Jesus Build My Hotrod de Ministry retentissent à chaque fois qu'apparaît tel ou tel personnage. Les violons de Psychose retentissent dans l'Appel de Chtulhu.


Rien de tel qu'un nouveau morceau de musique pour faire naître dans mon imagination une scène précise que je caserais ensuite dans un scénario. La musique libère l'imagination, la fait galoper ; elle permet sans aucun doute de renforcer la construction mentale.

Le jeu de Rôle je lui dois de grands souvenirs, une imagination toujours renouvelée et des moments de vie, de trouille et de rigolades aussi fort qu'au cinéma ; et ce cinéma c'est nous qui le faisons. Aujourd'hui encore j'ouvre l'Appel de Chtulhu (j'ai gardé la 4ème édition, celle qui nous a le plus servi) et je me dis... et si je relançais la machine ?



Les autres épisodes de ma vie musicale sur Duclock :
Héritage & Industrie (épisode 1)
Boys Boys Boys (épisode 3)
Musiques et Images (épisode 5)
Premières munitions (épisode 6)
Fin des années 80 (épisode 7)
Place de ma mob (épisode 8)
Solitude et bande originale (épisode 9)
Ce que Nirvana me disait (épisode 10)