Miles Davis, Tutu, Warner Bros, 1986.



Y a le visage de Miles en gros plan qui sort de l'ombre et reflète la lumière. Gamin cette photo de Irving Penn me fascinait. Les titres aussi, en rouge, au dos, surtout Splatch et Backyard Ritual. Alors je mettais l'album sur la platine et ça se barrait en sucette. J'avais l'impression d'écouter de la variétoche façon hit soirée camping. Grosse déception. Et pourtant je rééssayais en me disant, tu vas t'y faire à Tutu, étoile des années 80, clinquant et chromé de rythmes synthétiques avec la basse de Marcus Miller pour porter tout ça sur un plateau d'argent, avec la trompette de Miles Davis comme un fantôme. Hé bien non. Même maintenant j'y arrive pas, et pourtant je me repasse l'album régulièrement. Je me dis : il est trop propre, trop bien rangé. Sûr, mais y a un truc. La basse qui se met à délirer dans Full Nelson, elle m'emmène. Ce moment dub dans Don't lose your mind, puis la guitare ou plutôt le « clavier guitare » qui se pointe en contretemps, par exemple, j'aime... alors je me prends à rêver de remixer un peu tout ça, de le salir. Extirper les années 80 de Tutu.
Mais depuis peu je médite sur ce dialogue trouvé dans Dirty South Rap de Ace Atkins à la page 254 de l'édition brochée (édition du masque, 2006) :
« -Tu supportes pas que les choses soient pas comme tu veux ?
-Ouais.
-C'est pas cool la vie dans ses cas là. »
Et je devines que je vais continuer à me passer Tutu, de temps en temps.