Iciar Bollain, Ne dis rien (Te Doy Mis Ojos), 2003


Un film qui aide à comprendre

Les mécanismes de la violence, de la domination et de la soumission sont explicités dans le jeu d'acteur et la montée dramatique de l'histoire. Non pas qu'il soit pédagogique, mais le film va au-delà du factuel. La peur, la violence, le couple, la famille, l'art, le travail et l'espoir sont les principaux thèmes abordés. Cet homme anéantit la personnalité de sa femme, par peur de la "perdre", et par manque de confiance en lui. Cette tentative de contrôle de l'autre est destructrice et débouche sur la violence, voilà en grande partie ce qu'explique le film. Son titre original, Te doy mis ojos (littéralement, "je te donne mes yeux"), est plein d'un sens que la traduction française (Ne dis rien) ne respecte pas.



Un film fin

Te doy mis ojos est filmé comme une drame, alors qu'on assiste à une tragédie. Il y a peu d'effets de caméra, peu d'effets tout court à part quelques ressorts dramatiques un peu trop visibles (le coup des chaussons) mais pas gênants. Les étapes de la colère, les pressions de la société, de la famille, les pistes pour s'en sortir : tout est montré avec finesse et sobriété. Quelques scènes - tout en restant à l'écart du "cinéma spectacle" - sont terribles. La virtuosité du film n'est pas démonstrative.


Kandinsky


Et des résonances

Couplé avec une lecture de La domination masculine de Pierre Bourdieu (on pourra aussi voir le film de Patric Jean) et King Kong Théorie de Virginie Despentes par exemple, Te doy mis ojos peut permettre de réfléchir et donne des pistes pour sortir du cycle infernal. Dans une moindre mesure (la colère et l'alcool) on pourra aussi lire et visionner Feux Rouges (de Simenon et Cédric Khan). Voici un film dont nous aurions dû parler dans L'Indic n°6.


L'édition DVD (MK2) est accompagnée d'un court métrage (Un amour qui tue) et d'un entretien intéressant avec la réalisatrice Iciar Bollain.