Photo : Frank Bigotte
Pierre Coulon Cerisier & Wired System sortent l'album Soft To You qui devrait faire son chemin jusqu'aux oreilles amatrices de jazz électrique et électronique, de rock aussi, enfin de musique tout simplement. Voici une interview avec Pierre.
Dj Duclock : Bonjour Pierre, la musique vous êtes tombé dedans comment ?
Pierre Coulou Cerisier : J'ai toujours fait de la musique avec mes oreilles d'abord puis avec un instrument. Il y avait u piano à la maison, un bon piano accordé et tout et tout. Frère et soeur en jouaient. Dès l'age de 7 ans j'étais passionné par la poitrine généreuse de mon professeur et aussi par le son du piano ( quand même!). Cette relation qui se situait en dehors de la maison et en dehors de l'école était un espace de liberté d'expression extraordinaire qui m'a permis de comprendre le privilège que je pouvais avoir de vivre quelque chose qui n'appartenait qu'à moi seul. Mon instrument, le piano, est devenu un complice, un ami, un confident, ce qu'il est encore aujourd'hui. En plus d'être un partenaire ( très exigent d'ailleurs )...
Dj Duclock : Et le synthétiseur ? Comment y es-tu venu ? Peux-tu nous raconter ta première rencontre avec les claviers électroniques ?
Pierre Coulou Cerisier : Dans les années 75, j'écoutais tous les grands groupes dits "pop"," jazz rock", et "World" par la suite. Yes, Zappa, Mahavishnu Orchestra, Soft Machine, Weather Report, etc... C'est d'ailleurs avec ce souvenir d'ado et dans l'esprit de cette musique que j'ai voulu créer mon WIRED SYSTEM.
A l'époque les synthés n'étaient pas encore vraiment commercialisés mais il y avait l'orgue Hammond , le piano Rhode, le wurlitzer, et tous les instruments " électroniques" ( de véritables centrales téléphoniques ). Il y avait des réverb à bande magnétique et tout ce genre de choses. Donc j'ai commencé avec ça et puis un jour les synthés ont été comercialisés, vers 1980 me semble t-il.
Je me souviens du Korg ms 20 qui était un synthé de recherche en fait, avec des jacks qu'il fallait changer de place pour pouvoir changer de son. Il n'y avait d'ailleurs ni mémoire ni banque de son, il fallait le créer en temps réel, cabler, décabler, créer en direct les réglages de paramêtre, ( par exemple,on a vu souvent Jo Zawinul passer beaucoup de temps sous ses claviers à cabler et décabler pendant les concerts) enfin, un instrument passionnant dont la notice était en japonais et qui était destiné plus à des ingénieurs (ce que je ne suis pas) ou à des chercheurs qu'à des musiciens. Bien que je m'y sois risqué il faut bien dire que cette machine infernale était difficile à dompter sur scène.
Sont arrivés ensuite assez rapidement des synthés avec banque de sons et sauvegarde des mémoires et j'ai bien sûr abandonné petit à petit mes orgues électroniques pour les synthés analogiques.
Et puis Miles Davis est arrivé en France en 81 avec son nouveau son "électrique" (Album the man with the horn) et ensuite une série de disques dans la lignée dont un, "you are under arrest" je crois, était bourré de démonstration de ce qu'on pouvait faire avec le fameux DX7 de chez Yamaha.
De la même façon que les guitaristes de l'époque ont tous acheté un Jazz chorus Roland, je crois que tous les claviéristes ont acquis un DX7.
Dj Duclock : Il est clair qu'à l'écoute de Wired System on pense à Weather Report, Heldon, aux productions du Label JMS pour la France ou encore MPS pour l'Allemagne, on pense à tout un jazz mâtiné de rock qui respirait une énorme liberté de créations et de sonorités... que pensez-vous de la scène actuelle ?
Pierre Coulou Cerisier : Je ne sais pas vraiment ce qu'est au juste la scène actuelle. Nous avons à disposition une foule d'informations qui finit par brouiller totalement une lisibilité quelconque. Les appellations sont devenues multiples et diverses avec une quasi obligation de s'y conformer. C'est ce que j'ai pu constater des Scènes de Musique Actuelle par exemple qui à mon avis à force de faire ce genre de distinction et à force de rechercher une actualité "qui marche" se perdent dans une forme de conformisme navrant et oublient parfois le fond pour privilégier la forme.
On demande donc aux groupes d'être actuels, avec une exigence d'esthétique très restrictive. La conséquence je pense c'est que ça a tendance à tuer la création et la liberté d'expression. Mais bon ! Il faut que ça plaise au public, il faut cibler, il faut rentrer dans les cases, c'est dans le cahier des charges..., c'est la mission.
Les musiciens font des rêves de notoriété bien sûr et c'est bien normal.
Ils restent malheureusement tributaires du jeu imposé par ces structures subventionnées qui font la pluie et le beau temps.
De la sorte, en faisant des recherches curieuses sur le net, je me suis aperçu qu'une multitude de groupes ont une présentation digne de stars internationales, vidéo, éclairage de douze, look et tout ce qui s'en suit. Le problème c'est qu'en définitive je ne suis pas persuadé que la musique soit toujours...... passionnante dirons nous.
Comme dit l'autre, ce n'est que mon avis et je le partage, et puis je ne veux pas généraliser. Il y a bien sûr au milieu de tout ça des passionnés musiciens et diffuseurs qui font exception à cette règle et tant mieux. Merci à tous ceux là.
Néanmoins je regrette effectivement une époque ou l'on parlait simplement de groupes "pop", ce qui laissait une grande marge à la création et à l'expression artistique, ce qui laissait également au public le loisir de son sentiment et de son libre arbitre. Dans quelle case pourrions nous mettre aujourd'hui Zappa, ou King Crimson ( qui par moment proposait des plages totalement free jazz suivies de moment Rock vraiment Rock). Quelle scène prendrait aujourd'hui le risque de programmer un Soft Machine émergent ?
Avec le WIRED SYSTEM j'ai voulu travailler librement dans une esthétique vintage. J'en ai pris volontairement les clichés mais j'ai voulu aussi conserver l'esprit libre qui lui colle. Résultat, (je fais une caricature mais c'est assez proche de la réalité), pour une scène Jazz nous devenons Rock un peu trop, et pour une scène Rock nous versons dans le Jazz, Heu !!! Avez-vous écouté la musique ? Ou bien avez vous cherché à la classer?
Dj Duclock : Il me semble qu'Alexandre Saada (voir interview sur Duclock : http://duclock.blogspot.com/2009/05/alexandre-saada-et-les-3-questions-du.html ) rencontre le même problème avec les étiquettes. Pour ce qui est du "classement" de la musique, c'est sûrement en grande partie une affaire commerciale qui tente consciemment ou non de standardiser le goût en donnant des codes de composition et de sonorités afin de pouvoir faire rentrer un peu plus la musique dans l'industrie ; l'industrialisation devant produire en masse il faut que le produit ne soit pas compliqué à "reproduire". Le disque étant une industrie et par ailleurs l'un des médias actuels très répandu pour écouter de la musique... il semble malheureusement difficile d'échapper aux tentatives de classement. D'un autre côté ces classements existent (il faudrait voir depuis quand ?.. et si par hasard leur apparition ne se fait pas avec la musique enregistrée) et font partie intégrante de la musique : Rock, Jazz, Classique, Contemporaine et depuis peu Musique du Monde... ils orientent l'oreille et la composition. On notera aussi l'apparition de nouvelles étiquettes, m'est avis que l'étiquette "électro" ou "musique électronique" qui en elle même ne veut pas dire grand chose peut très bien être un genre de continuité du jazz ou de la musique contemporaine... et nous ne parlerons pas de toutes les classifications qui découpent la musique en "sous genre" et qui bien souvent sont éphémères quoi que correspondant à un "son" et une "époque" (le grunge par exemple). Pour ce qui est de l'écoute de la musique, chez Duclock le classement dans une boite n'est pas la priorité, on prend soin de bien écouter les disques que l'on reçoit. C'est à dire : se poser tranquillement, lancer le disque et surtout ne rien faire d'autre... un peu comme au concert. Au fait en parlant de concert, vous avez des dates de prévues prochainement avec le Wired System ?
Pierre Coulou Cerisier : Nous faisons une sortie régionale du CD Soft To You le 19 Novembre à Montpellier 34 et le 20 au centre culturel Muz' Art à Sauves 30. Nous jouerons également au centre culturel de Frontignan 34 le 28 janvier. Pour le reste le Wired System prend son envol qui n'en doutons pas vous le fera écouter bientôt dans tout l'hexagone et au delà si affinité. Toute l'équipe y travaille!
Dj Duclock : Merci, Pierre et j'espère qu'on va pouvoir venir vous écouter du côté de Nantes !
Wired System, Dirty Jazz
D'autres extraits de l'album sont visibles et écoutables sur le site de Pierre Coulon Cerisier
Wired System, Dirty Jazz
D'autres extraits de l'album sont visibles et écoutables sur le site de Pierre Coulon Cerisier