Dans Fugue Bâtarde, Antoine Bataille mélange diction de textes (dont un extrait du Livre de ma mère d'Albert Cohen) avec vocalise fantôme, électronique, piano et orchestration romantique tendue et flippante. L'expérience doit être à tenter en concert, ça tombe bien, il sera au Théâtre de Nesle (Paris 06) tous les Lundi à 21 h 30 jusqu'au 1er Mars.
Dj Duclock : Bonjour Antoine, lors de tes concerts tu es seul avec ton piano et ton matériel électronique... l'improvisation semble jouer une part importante durant ton concert, non ?
Antoine Bataille : Bonjour.
L'architecture des concerts est très précise. Cependant à l'intérieur de ce carcan se déploient des plages d'improvisation principalement au piano. Mais cette architecture même peut être bousculée et remise en question sur le vif.
Je joue avec un piano acoustique, un petit clavier, des filtres sonores, la voix, des textes et des pédales de sampling. Je conçois cet ensemble comme un instrument hybride, une entité avec laquelle je vise à trouver la même liberté que sur un piano seul. Cette liberté qui ouvre le champ de l'improvisation et de l'éphémère.
Dj Duclock : Tu mêles des lectures de textes dans le CD Fugue Bâtarde, fais-tu de même en concert ? Et comment les as-tu choisis ?
Antoine Bataille : Cet album est le prolongement direct et paradoxal des concerts. Donc le rapport au texte est le même sur scène. Il y a trois ans, au début du projet les textes étaient beaucoup moins présents. Puis ils se sont insinués petit à petit. Ils occupent actuellement une place centrale. Ils s'imposent à moi comme des évidences tant par leur sens que par leur son. Je dis depuis longtemps des extraits de "Je m'appelle Louise" de Marie Bataille. Cette écriture est emblématique de l'absolue résonance entre la musique des mots et ce qu'ils portent, leur violence, leur tendresse.
Dj Duclock : Et le chant ? Ces textes, pourquoi ne pas les chanter plutôt que de les "dire" ?
Antoine Bataille : J'utilise la voix chantée comme instrument, comme source sonore. Par contre les textes imposent leur propre musicalité. Il serait vain de chanter ceux que je dis actuellement. Cela altérerait leur signification et désaccorderait leur tonalité. Mais il se peut que demain de nouveaux textes apparaissent avec la nécessité de les chanter.
Dj Duclock : En musique, peux-tu nous dire d'où viennent tes influences ?
Antoine Bataille : Je préfère l'idée de nourritures à celle d'influences. Elles agissent davantage au niveau sensible que du point de vue esthétique ou technique. Ainsi je m'aperçois a posteriori à quel point mon travail est irrigué par des peintures, des sculptures, mais aussi des livres, des pièces de théâtre, des films... J'agis en réaction et non par mimétisme. Je ne cherche jamais à reproduire une couleur, mais je la laisse teinter ma fomentation. Je suis très attaché à cette notion de fomentation qui induit l'idée de décoction, de macération plus ou moins consciente.
Dj Duclock : Ok, peux-tu nous donner quelques noms d'ouvrages, de disques, de compositeurs qui sont particulièrement caloriques pour toi ?
Antoine Bataille : Je m'excuse pour cette longue liste, mais je suis incapable d'établir des priorités. Louise Giamari, Michel Madore, Manuella Ferré, Fred Deux, Alberto Giacometti, Léo Ferré, Francis Bacon, Paludes d'André Gide, Christophe Miralles, Miles Davis, Zoran Music, Giotto, Robert Wyatt, Christophe, Pipo Delbono, Barbara, Mikhaïl Boulgakov, Milan Kundera, Fazil Say, Le livre de ma Mère d'Albert Cohen, le Nisi Dominus et le Stabat Mater d'Antonio Vivaldi dirigés par Jean-Christophe Spinosi, Raphaël Imbert, l'Histoire de Melody Nelson et l'Homme à Tête de Chou de Serge Gainsbourg, le Requiem de Mozart, Un conte de Noël d'Arnaud Desplechin, Alfred Kubin, le concerto pour piano n°1 de Johannes Brahms interprété par Lars Vogt et le LSO au Barbican de Londres, Claude Sautet, Arvo Pärt, Sandro Botticelli, Jacques Brel, la transcription pour piano de Busoni de la chaconne de Jean Sebastien Bach, ses préludes et fugues interprétés par Glenn Gould, Bell Oeil, Giovanni Mirabassi, Camille Claudel, John Coltrane, l'Imprudence d'Alain Bashung, la Pietà de Michel Ange du musée du Duomo de Florence, Keith Jarrett en Solo, la Force du Destin de Giuseppe Verdi, Fin de partie de Samuel Beckett, la Vierge de Jean-Baptiste Pigalle de L'église Sainte Eustache de Paris, Dominique A, Regain de Jean Giono, Le concerto pour violon de Piotr Illitch Tchaikovski interprété par Nemanja Radulovic, Fanny Ferré, Pink Floyd, Marc Petit, Sabhan Adam, les sonates de Ludwig Van Beethoven par Artur Schnabel, Sophie Rocco, Jacques Prévert, Stanley Kubrick, la Marie-Madeleine de Donatello, Golden Door d'Emanuele Crialese, Nick Cave, l'ouverture du Ring de Richard Wagner, Philip Glass, Kaos de Paolo et Vittorio Taviani, René Magritte... et bien d'autres.
Dj Duclock : J'aime les listes, surtout quand dedans il y a des noms que je ne connais pas, ça permet des découvertes. Et en ce moment, qu'est-ce qui tourne chez toi sur la platine ? Le disque du moment, tu peux nous en parler un peu ?
Antoine Bataille : Actuellement je me ballade entre le dernier Mano Solo, que j'écoutais juste avant d'apprendre sa mort, le Carnaval des Animaux de Camille Saint Saëns, je cherche une interprétation de la Symphonie n°4 de Brahms et je continue de creuser l'album Bach-Coltrane de Raphaël Imbert. Un projet fascinant qui trouve le spirituel comme point de jonction.
Dj Duclock : Et qu'est-ce que tu bouquines en ce moment ?
Antoine Bataille : Actuellement je suis plongé dans Le guide du routard de Rome avant d'aller y visiter l'exposition Caravage-Bacon. Je me régale toujours avec l'Histoire de l'Art de Ernst Gombrich et je m'apprête à entamer l'Intranquille de Gérard Garouste après avoir lu la monographie préfacée par Michel Onfray.
Dj Duclock : Rome ! Bon sang, tu vas te régaler il paraît que c'est superbe ! Et Caravage en plus ! Tiens ça me fait penser qu'il faudrait que l'on parle un peu plus de peinture sur Duclock. Voici venir la dernière question. Peux tu nous parler de la dernière chose qui t'a surpris ? De la dernière fois où tu as été surpris ?
Antoine Bataille : Bruxelles sous la neige, et mon dernier concert. Chaque concert est une surprise... Et c'est tous les lundis au théâtre de Nesle à 21h30 (3 rue de Nesle Paris 6).
Voici un extrait particulièrement prometteur de concert d'Antoine Bataille enregitré au Théâtre les Déchargeurs en Octobre 2007.
Dj Duclock : Bonjour Antoine, lors de tes concerts tu es seul avec ton piano et ton matériel électronique... l'improvisation semble jouer une part importante durant ton concert, non ?
Antoine Bataille : Bonjour.
L'architecture des concerts est très précise. Cependant à l'intérieur de ce carcan se déploient des plages d'improvisation principalement au piano. Mais cette architecture même peut être bousculée et remise en question sur le vif.
Je joue avec un piano acoustique, un petit clavier, des filtres sonores, la voix, des textes et des pédales de sampling. Je conçois cet ensemble comme un instrument hybride, une entité avec laquelle je vise à trouver la même liberté que sur un piano seul. Cette liberté qui ouvre le champ de l'improvisation et de l'éphémère.
Dj Duclock : Tu mêles des lectures de textes dans le CD Fugue Bâtarde, fais-tu de même en concert ? Et comment les as-tu choisis ?
Antoine Bataille : Cet album est le prolongement direct et paradoxal des concerts. Donc le rapport au texte est le même sur scène. Il y a trois ans, au début du projet les textes étaient beaucoup moins présents. Puis ils se sont insinués petit à petit. Ils occupent actuellement une place centrale. Ils s'imposent à moi comme des évidences tant par leur sens que par leur son. Je dis depuis longtemps des extraits de "Je m'appelle Louise" de Marie Bataille. Cette écriture est emblématique de l'absolue résonance entre la musique des mots et ce qu'ils portent, leur violence, leur tendresse.
Dj Duclock : Et le chant ? Ces textes, pourquoi ne pas les chanter plutôt que de les "dire" ?
Antoine Bataille : J'utilise la voix chantée comme instrument, comme source sonore. Par contre les textes imposent leur propre musicalité. Il serait vain de chanter ceux que je dis actuellement. Cela altérerait leur signification et désaccorderait leur tonalité. Mais il se peut que demain de nouveaux textes apparaissent avec la nécessité de les chanter.
Dj Duclock : En musique, peux-tu nous dire d'où viennent tes influences ?
Antoine Bataille : Je préfère l'idée de nourritures à celle d'influences. Elles agissent davantage au niveau sensible que du point de vue esthétique ou technique. Ainsi je m'aperçois a posteriori à quel point mon travail est irrigué par des peintures, des sculptures, mais aussi des livres, des pièces de théâtre, des films... J'agis en réaction et non par mimétisme. Je ne cherche jamais à reproduire une couleur, mais je la laisse teinter ma fomentation. Je suis très attaché à cette notion de fomentation qui induit l'idée de décoction, de macération plus ou moins consciente.
Dj Duclock : Ok, peux-tu nous donner quelques noms d'ouvrages, de disques, de compositeurs qui sont particulièrement caloriques pour toi ?
Antoine Bataille : Je m'excuse pour cette longue liste, mais je suis incapable d'établir des priorités. Louise Giamari, Michel Madore, Manuella Ferré, Fred Deux, Alberto Giacometti, Léo Ferré, Francis Bacon, Paludes d'André Gide, Christophe Miralles, Miles Davis, Zoran Music, Giotto, Robert Wyatt, Christophe, Pipo Delbono, Barbara, Mikhaïl Boulgakov, Milan Kundera, Fazil Say, Le livre de ma Mère d'Albert Cohen, le Nisi Dominus et le Stabat Mater d'Antonio Vivaldi dirigés par Jean-Christophe Spinosi, Raphaël Imbert, l'Histoire de Melody Nelson et l'Homme à Tête de Chou de Serge Gainsbourg, le Requiem de Mozart, Un conte de Noël d'Arnaud Desplechin, Alfred Kubin, le concerto pour piano n°1 de Johannes Brahms interprété par Lars Vogt et le LSO au Barbican de Londres, Claude Sautet, Arvo Pärt, Sandro Botticelli, Jacques Brel, la transcription pour piano de Busoni de la chaconne de Jean Sebastien Bach, ses préludes et fugues interprétés par Glenn Gould, Bell Oeil, Giovanni Mirabassi, Camille Claudel, John Coltrane, l'Imprudence d'Alain Bashung, la Pietà de Michel Ange du musée du Duomo de Florence, Keith Jarrett en Solo, la Force du Destin de Giuseppe Verdi, Fin de partie de Samuel Beckett, la Vierge de Jean-Baptiste Pigalle de L'église Sainte Eustache de Paris, Dominique A, Regain de Jean Giono, Le concerto pour violon de Piotr Illitch Tchaikovski interprété par Nemanja Radulovic, Fanny Ferré, Pink Floyd, Marc Petit, Sabhan Adam, les sonates de Ludwig Van Beethoven par Artur Schnabel, Sophie Rocco, Jacques Prévert, Stanley Kubrick, la Marie-Madeleine de Donatello, Golden Door d'Emanuele Crialese, Nick Cave, l'ouverture du Ring de Richard Wagner, Philip Glass, Kaos de Paolo et Vittorio Taviani, René Magritte... et bien d'autres.
Dj Duclock : J'aime les listes, surtout quand dedans il y a des noms que je ne connais pas, ça permet des découvertes. Et en ce moment, qu'est-ce qui tourne chez toi sur la platine ? Le disque du moment, tu peux nous en parler un peu ?
Antoine Bataille : Actuellement je me ballade entre le dernier Mano Solo, que j'écoutais juste avant d'apprendre sa mort, le Carnaval des Animaux de Camille Saint Saëns, je cherche une interprétation de la Symphonie n°4 de Brahms et je continue de creuser l'album Bach-Coltrane de Raphaël Imbert. Un projet fascinant qui trouve le spirituel comme point de jonction.
Dj Duclock : Et qu'est-ce que tu bouquines en ce moment ?
Antoine Bataille : Actuellement je suis plongé dans Le guide du routard de Rome avant d'aller y visiter l'exposition Caravage-Bacon. Je me régale toujours avec l'Histoire de l'Art de Ernst Gombrich et je m'apprête à entamer l'Intranquille de Gérard Garouste après avoir lu la monographie préfacée par Michel Onfray.
Dj Duclock : Rome ! Bon sang, tu vas te régaler il paraît que c'est superbe ! Et Caravage en plus ! Tiens ça me fait penser qu'il faudrait que l'on parle un peu plus de peinture sur Duclock. Voici venir la dernière question. Peux tu nous parler de la dernière chose qui t'a surpris ? De la dernière fois où tu as été surpris ?
Antoine Bataille : Bruxelles sous la neige, et mon dernier concert. Chaque concert est une surprise... Et c'est tous les lundis au théâtre de Nesle à 21h30 (3 rue de Nesle Paris 6).
Voici un extrait particulièrement prometteur de concert d'Antoine Bataille enregitré au Théâtre les Déchargeurs en Octobre 2007.