Decline of the I


Decline of I concert Ferrailleur, Emeric Cloche
Decline of the I, Le Ferrailleur, Nantes, 2019

Le black metal penche du côté de la nostalgie, du déclin, de l’individualisme et de la fin. Nietzsche est une référence classique du genre, il est abondamment cité sur les pochettes d'albums ou dans les chansons. Si pour ma part je ne suis pas un fanatique du philosophe prussien, j'ai beaucoup aimé Mon oncle d'Amérique d'Alain Resnais et L'éloge de la fuite d'Henri Laborit.

Quand Mathilde m'a dit qu'une soirée black métal s'annonçait au Ferrailleur et qu'A.K. (Merrimack, Vorkreist...) serait de la partie avec son nouveau projet je suis allé faire un tour sur Internet pour voir de quoi il retournait. La vidéo sur laquelle je suis tombé s’appelle Je pense donc je fuis. Du Henri Laborit... A.K. articule son projet musical autour des écrits du neurobiologiste né à Hanoï. Il n'en fallait pas plus pour éveiller ma curiosité.

La musique de Decline of the I est à la hauteur du choix de ses samples (il y a beaucoup de citations, des phrases, des images projetées sur écran, des extraits d'enregistrements de voix). Le concert fût un de ces moments de grâce pour lesquels on fréquente les salles de spectacle. Une communion, une messe païenne, une messe philosophique, une messe psychologique... sociologique ? Une messe dans laquelle tu peux prendre ce qui t'intéresse, ce qui te cause et laisser le reste se noyer dans le flot des guitares. Plus tard entre Kronembourg, Triple Karmeliet et vodka j'apprends que c'était la première du groupe.

La musique de Decline of the I est à la auteur du choix de ses samples...

Je suis reparti avec le dernier album en 33 tours sous le crachin nantais, des images du concert plein la tête. Les anneaux de la mémoire qui bordent de l'île de Nantes à cet endroit brillaient dans la nuit. Néons de toutes les couleurs qui donnent un air de Jacques Tati aux anciens quais. En croisant les personnes ivres qui se promènent ici au milieu de la nuit, je me disais qu'on ne retrouve jamais sur disque ce que l'on a entendu sur scène. J'habite à 15 minutes à pied du Ferrailleur et sur la route le crachin s'est transformé en pluie battante. J'ai fais ce que j'ai pu pour protéger mon disque tout en songeant à des trucs sombres et beaux. 

Encore trempé, j'ai posé la galette sur la platine et mon cul dans un fauteuil. Un casque sur les oreilles, j'ai refais le voyage dans la gangue de guitares, de batterie et de samples. Un cinéma intérieur, un grand mélange ; une dernière claque, derrière la tête, avant de dormir. Le disque est aussi intéressant que le concert.

Il y avait d'autres groupes ce soir là sur la scène du Ferrailleur : Ætheria Conscientia (avec un saxophone, un black metal aux relents tribaux, à suivre), Incipient Chaos (abrupt et violent) et Demande à la poussière (dont il faudra reparler).

Decline of the I, Agonia Records, 2018
Photo : Emeric Cloche, Le Ferrailleur, Nantes, mars 2019.