Metallica, Hardwired... To Self-Destruct

Metallica Hardwired... to Self Destruct

Avec Metallica je me suis arrêté au Black Album (Elektra Records, 1991)... J'ai essayé d'écouter un peu après mais ça ne passait pas. Comme beaucoup j'avais sûrement mis trop de souvenirs dans les premiers albums et les nouveautés ne collaient pas.

Écouter la musique comme un mort

Dès la première écoute la chanson lovecratienne Dream No More avec son clip façon Cthulhu 90' a fonctionné sur moi, comme Atlas, Rise ! quelques jours avant. Je me suis dit : "Hé ces nouvelles chansons de Metallica ce n'est pas tout à fait Ride The Ligthning ou Master of Puppets mais il y a un truc". Et puis la nuit, à 4 heures du matin, je me suis réécouté Master Of Puppets, comme ça, pour voir ce que ça faisait, et surprise le son et la musique m'ont semblé bien plus binaires, un peu plus pauvres qu'à l'époque. J'ai fissa élaboré toute une théorie là-dessus. Dans cette théorie il est pas mal question d'imaginaire et de construction autour du son (dont la construction de souvenirs), de façon d'écouter aussi. Massimo Carlotto parle de cela dans La vérité de l'Alligator, le Série Noire n°2494. Il parle de gens qui écoutent de la musique comme des morts parce qu'ils sont restés coincés sur une époque et qu'ils tournent en rond musicalement dans les souvenirs. Il me semble qu'il faut écouter ce nouvel album avec ceci en tête, même si - quand même - Cthulhu fonctionne à tous les coups comme une madeleine de Proust et que Atlas, Rise ! rappelle Master Of Puppets.

Un mot sur le Black Metal

Le clip de ManUNkind réalisé par Jonas Åkerlund (réalisateur de Turn The Page, Whisky in the Jar) ressemble à un de biopic (il s'agit d'ailleurs d'un preview du film Lord Of Chaos). La chanson aborde le nihilisme et la fascination de la scène Black Metal à ses débuts. Ce n'est pas un hommage à Mayhem, non, mais un épisode de l'Histoire du genre et même si ça sent le Hollywood et le propre ça fonctionne. Public Enemy avait fait un morceau (American Gangster) avec la même démarche en parlant des travers du Gansta Rap. La chanson de Metallica s'interroge sur le genre et sur ce qu'il dit et véhicule. Même si la plupart des gens qui écoutent du métal font la part des choses entre imagerie, discours, morale et choix de vie il est clair que Le Black Metal n'est pas une musique anodine dans ses propos.



12 Clips

Chacune des 12 chansons de l'album donne lieu à un clip plus ou moins réussi. J'ai toujours été un peu mitigé cochon d'Inde quant au fait d'écouter et de regarder la musique en clip. Les images sont envahissantes pour l'imaginaire, il vaut mieux bien connaître le morceau avant de regarder un clip. Ainsi le clip peut apporter une nouvelle piste d'interprétation, une variation. Certains des douze films tournés façon concert ou répétition en studio peuvent cependant se regarder sans risque.
Côté réalisation Claire Marie Vogel (Confusion) colle bien à l'une des thématiques chères à Metallica : la vie brisée de l'ancien combattant. Les photographies de Herring & Herring, qui ont aussi produit les photos à base de superpositions de visages qui illustrent l'album, signent trois réalisations, parmi elles Am I Savage ? est assez dérangeante. La chanson Lovecraftienne Dream No More se voit gratifiée d'un clip signé Tom Kirk, le plus réussi de la série à mon sens (le même Tom Kirk clip aussi Moth Into Flame façon concert dans un lieu un peu étrange). Douze chansons en clip il y a forcément des hauts et des bas...



Et la musique alors ?

Greg Fidelman (Johnny Cash, Slayer, The Red Hot Chili Peppers, System Of A Down, Sick Of It All...) le même ingénieur du son que pour les deux derniers albums (Death Magnetic et Lulu) est aux manettes il propose un son massif. Un son moins compressé que Death Magnetic mais avec une basse souvent mal définie (c'est un classique dans le rock et le metal la basse noyée). Une écoute de ... And justice for all rappellera que cette instrument n'a pas toujours été très présent au mixage dans Metallica.
La musique est bonne, la frappe de Lars Ulrich est à la fois très présente, froide et groovy, les riffs de guitares sont lourds, les solos pas chiants, les paroles intéressantes et évocatrices, la voix de James Hetfield semble être revenue.  Kirk Hammet n'a pas participé à l'élaboration des compositions à part pour les solos de guitares, le processus de création est largement dominé par le duo Lars Ulrich, James Hetfield, ça n'empêche pas au guitariste d'apporter sa patte, quelques notes bien senties qui permettent au morceau de s'envoler. Quoi qu'il en soit, la rage est là, pas tout à fait la même qu'aux débuts du groupe... La rage a grandit. Les morceaux longs ne sont pas taillés pour les radios ni l'Internet (où le temps de concentration est minime). "On voulait créer quelque chose de simple, direct, agressif. Nos chansons sonnent comme certaines des cinq premiers albums. Mais celui-ci n'est pas une copie carbone ou un ersatz. Revenir aux sources de notre inspiration, oui, mais avec l'intention aussi de créer quelque chose de nouveau" dit Kirk Hammet, la mission est accomplie. Ici, l'album tourne en boucle sur la platine ou au casque sur le baladeur depuis bientôt une semaine, disque 1 ou disque 2 aucune des douze chansons ne fait de remplissage, elles ont toutes quelque chose.



Se replonger dans la discographie, celle que l'on avait abandonnée ?

Du coup j'ai jeté une oreille sur Death Magnetic, il y a des choses là-dedans (dont All Nightmare Long, Cyanide et The Day That Never Comes) même si le son le compressé est trop lisse ; lisse façon jouet en plastique chinois Bontempi, ce qui à mon sens sied assez mal au propos, à moins que ce soit là un moyen de sonner garage moderne ?
Peut-être est-il temps de se replonger dans la discographie du groupe, cette discographie que beaucoup ont laissé sur le bord de la route depuis le Black Album ou One...