"Un vendredi soir, tante Zaza vint dîner à la maison. Elle était fort contrariée parce que, cette semaine-là, personne dans la famille n'était en mesure de l'accompagner en villégiature. La contrariété seyait à ses charmes qui soudain changèrent notre humble souper en un banquet princier. C'était à ne pas y croire : les verres étaient finement taillés dans du baccarat, les assiettes venaient de Sèvres, les couverts étaient en argent étincelant. La nappe était brodée par des mains d'Aubusson. L'eau du robinet avait la saveur d'un champagne, le pain le goût d'un grand fromage. Le court-bouillon au poisson exhalait les fragrance de la grande cuisine. La lumière de la pièce ne provenait pas de la lampe, mais des yeux verts piqués d'or de Zaza, tandis que ma fascination tombait tout droit de ses seins.
-Pourquoi Olivier ne viendrait pas à la ferme avec moi ? dit-elle."
Réédité plusieurs fois par Gallimard, à la chasse à la nouvelle, vous n'aurez pas trop de mal pour trouver ce court texte de René Depestre écrit en 1981... Alléluia pour une femme-jardin est composé de trois chants. Un peu plus de 25 pages de liberté, d'érotisme et qui comportent aussi quelques discrets coups de pieds au cul des conventions.