Max Obione est un infatiguable du polar. Après avoir fondé la coopérative d'Édition Krakoen, il se lance dans l'édition numérique avec SKA. Il est aussi écrivain de roman noir et de nouvelles. En ce dimanche de Novembre, Max se souvient de cet air...
Portbail,
vacances été 1986, village de pêcheurs. Je lis Tolstoï après le
dîner, au creux de mon page. Du barouf dans la maison d’à-côté,
un jeune couple vit fenêtres et porte ouvertes, son à fond les
manettes, toujours le même disque. Au bout d’une heure, excédé,
je descends leur demander de baisser leur musique de sauvages. La
môme est gironde, le mec sympa, ils m’invitent à boire un café,
puis un tarpé circule, gnôle à la suite, rinchette et super
rinchette, Anna Karénine peut bien aller au diable ! C’est de la
bonne goutte, distillée en fraude par un paysan de l’arrière-pays
de La Haye-du-Puits. “C’est quoi vot’ daube que vous mettez si
fort ?” que j’articule mollement, déjà en dessous de la ligne
de flottaison. “Eh ! l’autre, il connaît pas les Ramones
!” Ce soir-là, j’ai découvert ces dingues de Ricains, ces
gueulards allumés qui tutoyaient les anges à coup de décibels
branchés sur la centrale de Flamanville. Rentré à Saint-Lô, j’ai
fouillé les bacs du disquaire... pour dégotter mon premier album
des Ramones. Accro depuis lors !