Seul le silence est conté par un narrateur qui agonise et revient sur les évènements l’ayant mené où il est. La force de ce roman, à mon sens, c’est de mélanger une histoire de serial killer d’enfants à la peinture d’une petite ville américaine de Georgie. Les peurs des gens refermés sur eux, leur hypocrisie, leur solidarité et leur haine à la fois.
« On y prônait la religion, la tolérance et l’abstinence, mais les bars étaient bondés, et quelque part à la périphérie de la ville se trouverait une maison appartenant à une femme célibataire, une maison dans laquelle il y aurait deux ou trois filles. (...) Les gens de Stone Gap abhorraient la violence, mais chaque homme possédait un pistolet et chaque femme avait plongé les mains dans le sang d’un porc égorgé. »
Certains passages vantent légèrement un passé meilleur opposé à un monde qui devient fou, mais sans trop appuyer, d’une manière qui n’est pas sans rappeler Cormac McCarthy.
Nous sommes au début de la seconde guerre mondiale, évènement à la fois lointain et proche pour les américains. Joseph a neuf ans quand son père meurt. Il va nous raconter son histoire, lui qui veut devenir écrivain. « Il te faut juste une première phrase, dit-il. Chaque grand livre commence par une première grande phrase, tu sais ? » L’enfant qu’il était, l’homme mourant qu’il est devenu, voilà les évènements que le lecteur va découvrir. Joseph devient quelqu’un de très proche, et son histoire en est d’autant plus touchante.
Ellory a une façon de décrire les choses, de prendre son temps pour nous immerger dans une ambiance, s’attardant a priori sur des détails, pour ensuite balancer le pire sans s’y attarder. L'ensemble est donc très habile, captivant et émouvant pour le lecteur.
R.J. Ellory, Seul le silence, Sonatine 2008, 22 euros, 498p.
Côté actualité, Ellory est passé par Nantes présenter son dernier roman, Vendetta (dont je parlerai plus tard, je l'ai trouvé nettement en dessous de Seul le Silence). Je suis allée l'interviewer le 24 septembre dernier pour L'Indic, à découvrir au mois de novembre donc ! Je peux quand même vous livrer cette toute nouvelle information : un autre lecteur a été impressionné par Seul le Silence, il s'agit d'Olivier Dahan ! Le réalisateur français a acheté les droits de son roman, et RJ Ellory a écrit l'adaptation. À suivre bientôt...
Chez Mickey [3d] aussi le roman a marqué puisqu'une chanson lui est consacrée, Je m'appelle Joseph, que l'on peut écouter ici.
J'me dis qu'c'est long j'me dis qu'c'est court
J'me dis qu'c'est pas la première fois
Je sens le silence qui m'entoure
Et mon pouls qui ne faiblit pas
Je viens en ami dit le silence
Ne regarde pas plus loin que ce nouveau jour qui t'appelle
Et t'invite dans son jardin chargé d'air et de lumière
Un nouveau matin m'entoure et moi dans mes chaussures froides
On s'élance comme on peut chacun dans son coin
Je m'appelle Joseph, mon père il est mort
Je vis seul avec ma mère, à Augusta Falls
J'habite en Georgie, Okefenokee
Ici tout est calme le soir il n'y a pas un bruit
Ne me touchez pas
Pourquoi le ciel est bleu et noir
Je m'en vais déjà
Ecrasé sur moi
Je n'entends plus mon coeur qui bat
Je ne suis plus là
Je m'en vais déjà
Alexandra Weber la fille de mes rêves
La seule qui réveille mon coeur quand le jour se lève
Toutes celles qu'on a trouvées
Sans tête et sans bras
Après elles deviennent des anges et je les vois
J'vais tout vous expliquer
Moi j'y suis pour rien
J'ai juste aperçu ses pieds dans les herbes au loin
Quelqu'un peut m'expliquer
Pourquoi elle est là ?
Ça peut pas être un humain qui lui a fait ça
Ne me touchez pas
Pourquoi le ciel est bleu et noir
Je m'en vais déjà
Ecrasé sur moi
Je n'entends plus mon coeur qui bat
Je ne suis plus là
Je m'en vais déjà