Noir, Robert Coover
Robert Coover, Noir, 2008, Seuil, 18 euros, 204 p.
Il ne faut pas attendre bien longtemps dans ce roman pour humer le détective privé ambiance film noir. Le bureau, la porte vitrée avec le nom écrit dessus, la secrétaire, cliente mystérieuse et fantasmatique, le chapeau et les ruelles sombres, un peu d’alcool... tout y est. « Une tapée de problèmes, cette fille, et si tu avais été malin, tu l’aurais envoyée promener. Mais il faut payer le loyer, tu n’as pas assez de boulot pour refuser un client. Et puis en plus, elle avait de belles jambes. Alors, même si son histoire t’était connue avant même qu’elle te la raconte, la chronique inéluctable du sexe, de l’argent, de la trahison (mais qu’est-ce qu’il a, ce putain de monde, de toute façon ?), tu lui as demandé de la raconter. Depuis le début, as-tu dit. » Et moi aussi, j’ai l’impression de la connaître cette rengaine, façon images sur grand écran.
Robert Coover se place pile dans cet univers. Son détective se nomme Phil M. Noir, il le tutoie et signale l’hommage. « A la suite du préambule habituel : Tu étais resté au bureau tard. » « Tu penses que tu vas devoir descendre quelqu’un, c’est ce que dit le pistolet dans ta main. Il insiste. L’accessoire de théâtre qui fait basculer l’intrigue, une autre sorte de piège de l’histoire. » « Le film dans lequel tu te trouves. A poursuivre des ombres. » Parfois quand Coover tutoie son personnage, c’est aussi le lecteur qui se sent interpellé. « Mais même si l’histoire t’est familière et si tu en connais la fin, il est difficile d’en sortir. (...) De sorte qu’il ne s’agit pas de l’histoire dans laquelle tu es piégé, comme tout le monde, mais de comment, une fois conscient de ça, tu vas jouer la pièce. Ton style. La classe. Les actions que tu entreprends. Tourner autour du rythme, comme disait Fingers. » Là, c’est même le travail de l’auteur, les arcanes du roman qui sont soulignés.
La force de ce roman, qui échappe à l’impression de déjà lu malgré tous ces repères familiers, tient dans l’écriture, le travail de Coover, qui y glisse du fantastique, de l’irréel et des faux-semblants, à l’image de la scène des mannequins ou de celle des miroirs. Noir semble prendre conscience de son existence de personnage de roman et l’on pense à Woody Allen avec La rose pourpre du Caire. La narration elle aussi suit un rythme particulier, non-linéaire, construite en flashbacks pour expliquer les instants passés sous silence.
Et puis il ne faut pas oublier les lieux, primordiaux dans ce genre d’histoire et Robert Coover les a respectés. Le bar (et ses horloges réglées avec quinze minutes de retôt), le port mais surtout la ville, faite de souterrains et ruelles, dont une qui est carrément LA ruelle. « La ruelle ne se trouve sur aucun plan de la ville », c’est la ruelle de la fiction, celle de toutes les histoires. A la fois sans issue et faite de passages secrets s’ouvrant dans les murs, tout ça comme un décor qui renforce le sentiment cinématographique. On est aussi un peu dans Alice au Pays des merveilles, entouré de Flame la stripteaseuse, Michiko la pute tatouée sur tout le corps, Mister Big l’ombre anonyme et Rats l’indic des rues sombres...
Robert Coover se place pile dans cet univers. Son détective se nomme Phil M. Noir, il le tutoie et signale l’hommage. « A la suite du préambule habituel : Tu étais resté au bureau tard. » « Tu penses que tu vas devoir descendre quelqu’un, c’est ce que dit le pistolet dans ta main. Il insiste. L’accessoire de théâtre qui fait basculer l’intrigue, une autre sorte de piège de l’histoire. » « Le film dans lequel tu te trouves. A poursuivre des ombres. » Parfois quand Coover tutoie son personnage, c’est aussi le lecteur qui se sent interpellé. « Mais même si l’histoire t’est familière et si tu en connais la fin, il est difficile d’en sortir. (...) De sorte qu’il ne s’agit pas de l’histoire dans laquelle tu es piégé, comme tout le monde, mais de comment, une fois conscient de ça, tu vas jouer la pièce. Ton style. La classe. Les actions que tu entreprends. Tourner autour du rythme, comme disait Fingers. » Là, c’est même le travail de l’auteur, les arcanes du roman qui sont soulignés.
La force de ce roman, qui échappe à l’impression de déjà lu malgré tous ces repères familiers, tient dans l’écriture, le travail de Coover, qui y glisse du fantastique, de l’irréel et des faux-semblants, à l’image de la scène des mannequins ou de celle des miroirs. Noir semble prendre conscience de son existence de personnage de roman et l’on pense à Woody Allen avec La rose pourpre du Caire. La narration elle aussi suit un rythme particulier, non-linéaire, construite en flashbacks pour expliquer les instants passés sous silence.
Et puis il ne faut pas oublier les lieux, primordiaux dans ce genre d’histoire et Robert Coover les a respectés. Le bar (et ses horloges réglées avec quinze minutes de retôt), le port mais surtout la ville, faite de souterrains et ruelles, dont une qui est carrément LA ruelle. « La ruelle ne se trouve sur aucun plan de la ville », c’est la ruelle de la fiction, celle de toutes les histoires. A la fois sans issue et faite de passages secrets s’ouvrant dans les murs, tout ça comme un décor qui renforce le sentiment cinématographique. On est aussi un peu dans Alice au Pays des merveilles, entouré de Flame la stripteaseuse, Michiko la pute tatouée sur tout le corps, Mister Big l’ombre anonyme et Rats l’indic des rues sombres...
Robert Coover, Noir, 2008, Seuil, 18 euros, 204 p.