Dominique Manotti, historienne au service du roman noir
Dominique Manotti était invitée par la médiathèque de Rezé ce 18 novembre. Nous l'avons écoutée faire la lecture d'une nouvelle à paraître dans 813, basée sur un fait divers, et des premières lignes de son futur roman. Après 1h30 de questions-réponses instructives menées par une des bibliothécaires, j'aurai le plaisir de lui poser les questions rituelles. Je profite de l'occasion pour vous inciter à lire Lorraine Connection, titre par lequel je l'ai découverte.
Lorrain Connection débute dans une usine, à la chaîne, avec les ouvriers et ouvrières. Cette première partie fulgurante, comme une immersion dans un documentaire, se poursuivra sans faiblir. L'auteur le disait pendant cette rencontre à la médiathèque, elle adhère au principe énoncé par le cinéaste Cecil B. DeMille : pour faire un film il faut commencer par un tremblement de terre et continuer de faire monter la pression.
« Séquestration. On va entrer là où nous ne sommes pas à notre place, envahir leur espace, bloquer nos patrons en chair et en os, les bousculer, les enfermer avec nous, leur parler d’égal à égal. Au moins pour un temps. On touche à l’ordre social. Au moins pour un temps. »
Choix d’enquête : la privatisation de Thomson, sujet bien réel des unes de journaux à la fin des années 1990. Dominique Manotti en fait un développement romancé ; le lecteur n’aura aucune peine à croire la possible réalité des petits éléments qui constituent le sujet. Imbrication entre politique et finance, industrie et pouvoir, subventions européennes et intérêts locaux, entrelacs de complicités et réseaux d’influence. Tout passe à la moulinette avec une grande précision, Alcatel, Matra, Lagardère, autant de faits rapidement vérifiables, en quelques recherches sur le net. Pour autant, Dominique Manotti ne produit pas un essai ou un compte-rendu. Elle articule ces faits techniques et les inclue dans un décor soutenu par des personnages représentatifs de chaque partie : ouvriers, hommes de la haute finance, enquêteur en assurance, mercenaires. Les rapports sociaux sont clairement mis en évidence, de notables à flics, d’ouvriers à chefs, et même d’ouvrier à ouvrier, avec toutes les divergences possibles. L’humain reste au centre de tout. La ville aussi, prototype de la ville ouvrière qui se meurt.
« Dans le hall inondé de soleil, une charmante hôtesse derrière un comptoir lui sourit. Sur un grand tableau, le nom de toutes les sociétés présentes dans l’immeuble. Emploi et formation à tous les étages. Les parasites qui prospèrent sur la gestion sociale du chômage ont tous trouvé refuge ici, où la mairie, qui a racheté les Grands Bureaux, leur offre l’hospitalité. Tu as bien fait de prendre le large, gamin. »
Dans un style mêlant phrases courtes, hachées, et monologues intégrés, l’auteur ne nous lâche pas. S’il en restait un peu, on perd notre naïveté en même temps que cette incroyable femme, « Stakhanova ». Lutte et désespoir imprègnent fortement la lecture. « On n’y croit pas à ces choses-là, on n’y croit pas avant qu’elles vous arrivent. La vie des femmes du peuple compte pour que dalle. Nous pouvons bien nous faire violer, écrabouiller ou pendre, tout le monde s’en fout. »
Ce roman de la magouille est un roman diablement noir.
Je notule : Que lisez-vous en ce moment ?
Dominique Manotti : Je viens de lire La griffe du chien de Don Winslow, je trouve que c'est le meilleur roman de la saison, formidable, absolument formidable. Et puis j’ai lu Séquelles, en Série Noire, d’un australien. J’ai bien aimé. Je ne me souviens pas du nom de l’auteur par contre. (Il s'agit de Peter Temple)
Je notule : Qu'écoutez-vous en ce moment ?
Enormément de jazz de ma génération. Et beaucoup de rap aussi, mais très peu de rock n’roll.
Je notule : Quelle est votre dernière surprise, la dernière fois que quelque chose vous a surpris ?
Dominique Manotti : ... difficile de répondre... Quand je suis tombée de cheval en début d’année. Je me suis fait 24 fractures.
En off je l'interroge sur l’écriture de scénario pour la télévision dont j'avais entendu parler. Elle m’annonce que le projet est tombé à l'eau. Mais, petit scoop que je suis autorisée à vous annoncer, ce projet s’est transformé en roman à 4 mains avec DOA. Une bonne nouvelle et une collaboration détonnante entre ces deux auteurs !
« Séquestration. On va entrer là où nous ne sommes pas à notre place, envahir leur espace, bloquer nos patrons en chair et en os, les bousculer, les enfermer avec nous, leur parler d’égal à égal. Au moins pour un temps. On touche à l’ordre social. Au moins pour un temps. »
Choix d’enquête : la privatisation de Thomson, sujet bien réel des unes de journaux à la fin des années 1990. Dominique Manotti en fait un développement romancé ; le lecteur n’aura aucune peine à croire la possible réalité des petits éléments qui constituent le sujet. Imbrication entre politique et finance, industrie et pouvoir, subventions européennes et intérêts locaux, entrelacs de complicités et réseaux d’influence. Tout passe à la moulinette avec une grande précision, Alcatel, Matra, Lagardère, autant de faits rapidement vérifiables, en quelques recherches sur le net. Pour autant, Dominique Manotti ne produit pas un essai ou un compte-rendu. Elle articule ces faits techniques et les inclue dans un décor soutenu par des personnages représentatifs de chaque partie : ouvriers, hommes de la haute finance, enquêteur en assurance, mercenaires. Les rapports sociaux sont clairement mis en évidence, de notables à flics, d’ouvriers à chefs, et même d’ouvrier à ouvrier, avec toutes les divergences possibles. L’humain reste au centre de tout. La ville aussi, prototype de la ville ouvrière qui se meurt.
« Dans le hall inondé de soleil, une charmante hôtesse derrière un comptoir lui sourit. Sur un grand tableau, le nom de toutes les sociétés présentes dans l’immeuble. Emploi et formation à tous les étages. Les parasites qui prospèrent sur la gestion sociale du chômage ont tous trouvé refuge ici, où la mairie, qui a racheté les Grands Bureaux, leur offre l’hospitalité. Tu as bien fait de prendre le large, gamin. »
Dans un style mêlant phrases courtes, hachées, et monologues intégrés, l’auteur ne nous lâche pas. S’il en restait un peu, on perd notre naïveté en même temps que cette incroyable femme, « Stakhanova ». Lutte et désespoir imprègnent fortement la lecture. « On n’y croit pas à ces choses-là, on n’y croit pas avant qu’elles vous arrivent. La vie des femmes du peuple compte pour que dalle. Nous pouvons bien nous faire violer, écrabouiller ou pendre, tout le monde s’en fout. »
Ce roman de la magouille est un roman diablement noir.
Dominique Manotti et les 3 questions du Dj Duclock
Je notule : Que lisez-vous en ce moment ?
Dominique Manotti : Je viens de lire La griffe du chien de Don Winslow, je trouve que c'est le meilleur roman de la saison, formidable, absolument formidable. Et puis j’ai lu Séquelles, en Série Noire, d’un australien. J’ai bien aimé. Je ne me souviens pas du nom de l’auteur par contre. (Il s'agit de Peter Temple)
Je notule : Qu'écoutez-vous en ce moment ?
Enormément de jazz de ma génération. Et beaucoup de rap aussi, mais très peu de rock n’roll.
Je notule : Quelle est votre dernière surprise, la dernière fois que quelque chose vous a surpris ?
Dominique Manotti : ... difficile de répondre... Quand je suis tombée de cheval en début d’année. Je me suis fait 24 fractures.
En off je l'interroge sur l’écriture de scénario pour la télévision dont j'avais entendu parler. Elle m’annonce que le projet est tombé à l'eau. Mais, petit scoop que je suis autorisée à vous annoncer, ce projet s’est transformé en roman à 4 mains avec DOA. Une bonne nouvelle et une collaboration détonnante entre ces deux auteurs !