Delphine Minoui, Iran, Badjens, mauvais genre

 Delphine Minoui est franco-iranienne, elle travaille comme journaliste en Iran et dans divers pays du Moyent Orient ; prix Albert Londres en 2006 pour une série d'articles sur L'Irak, elle est aussi romancière. Son roman Badjens est sorti en 2024. Ce mot "bad-jens" peut se traduire du persan par "mauvais genre" ou encore "espiègle, effrontée". Les iraniennes se le sont approprié... Badjens peut aussi se traduire par "badass".

"Désolé je suis un homme, tu comprends ?"

La vie de Zahra commence mal, c'est une fille et son calvaire débute avant sa naissance et se poursuit avec son frère cadet "le trésor de la famille". Le clou sera enfoncé avec la "fête des devoirs". Avec l'histoire de Zahra - un monologue intérieur à la première personne -  on découvre une jeunesse qui ressemble fort à la nôtre, avec Internet, les téléphones portables, les amies et les amis de la ville de Chiraz, celles et ceux rencontrés au détour d'une application. Ce sont des outils actuels avec les hashtags, une fenêtre sur le monde. Un monde à elle, tout comme les tatouages qu'elle dessine sur la peau de ses amies. C'est aussi un monde sous le joug de la Révolution et de ses gardiens ; du patriarcat. En Iran le corps des femmes appartient au père et à la révolution islamique. Le voile est un symbole institutionnalisé, comme une seconde peau pour les femmes. L'Iran est un pays où l'on va au devant de la mort dans l'espace public si l'on quitte son voile ou si l'on manifeste. Zahra à 16 ans. C'est jeune 16 ans pour risquer la mort dans la rue, mais c'est déjà beaucoup 16 ans quand on n'en peut plus d'étouffer.

Le martyr est une figure révolutionnaire en Iran et il est terrible de voir comment cette jeune femme va s'emparer de cette image, pour être libre. Avec ce cri de révolte, universel : "Femme, vie liberté".

Emeric Cloche.

 

Delphine Minoui, Badjens, Éditions du Seuil, 2024, 150 pages, 18 Euros. 

Couverture du livre Badjens de Delphine Minoui. Une femme enlève son voile et fait le signe de la victoire en souriant. Derrière elle il y a la ville avec une manifestation et le portrait de deux mollah.