Enemy (Denis Villeneuve, 2014)


Le cinéma fantastique (au sens de Dino Buzatti ou des bouquins de La Clef d'Argent) n'est pas chose si courante à l'heure actuelle. Denis Villeneuve (le réalisateur de Prisoners) propose un film dont la narration tient un peu du puzzle (comme dans Les Salauds de Claire Denis).

Je n'ai pas lu le livre de Saramago dont est tiré le film, et je ne sais pas si c'est de cela qu'il parle mais l'araignée présente dans plusieurs scènes me semble figurer la dépression ou la folie du personnage principal. Le fantastique fonctionne souvent ainsi, il met des images (métaphore, comparaison) sur le monde. Le duo de personnages au centre du film (tous les deux joués par Jake Gyllenhaal) est très réussi. Issus de deux niveaux sociaux différents, ils possèdent deux caractères différents. Le riche (un acteur) est plutôt basique et quelque peu arrogant et le middle class (un prof) est plutôt déprimé et gentil. Les autres acteurs sont bons (même Mélanie Laurent) voire excellent pour Sarah Gadon. Le film est lent et beau (quoi que beau ne soit pas forcément le bon mot). La musique de Danny Bensi et Saunder Jurriaans - prégnante - apporte une touche supplémentaire au côté un peu flippant. Toronto y est filmée comme une ville froide, fonctionnelle et oppressante (un sentiment que l'on retrouve dans Shiver de David Cronenberg). La photo et le générique de fin sentent les années 70 (comme dans Under The Skin). La question du double permet d'explorer la vie de couple et les choix de vie. Deux thèmes traités par ailleurs en 1966 dans le film de John Frankenheimer : Seconds, l'opération diabolique que vous avez peut-être raté au Cinématographe de Nantes.