En français dans le texte



Il y aurait carrément une étude sociologique à faire sur ce phénomène : souvent les auditeurs qui écoutent de la musique anglo-saxonne ne traduisent pas les paroles, ou très peu, et peuvent ainsi coller un imaginaire très fort derrière des phrases où quelque mots ressortent "Down the road", "deep inside", "dark side", "going home"... La voix devient alors un instrument peu connoté, comme une guitare, un banjo ou un saxophone. Quand les paroles deviennent compréhensibles, le message - le sens dégagé par le texte - devient prépondérant et l'auditeur a tendance à faire passer les paroles au tout tout premier plan et il peut alors lui sembler que le champ musical se rétrécit... aux paroles. La part d'imaginaire ayant été aussi rognée en partie par le sens "plus clair et plus fort" donné par des paroles plus connues.

Jacques Bertin, Trois bouquets


Il faudrait aussi se pencher sur la façon dont les textes francophones sont travaillés, en règle général il semble que la chanson française se préocuppe plus du sens que de la sonorité du mot pour aboutir à un texte. Manset, par exemple, travaille à la manière anglo-saxonne, les concordances de son et de rythme sont particulièrement soignées.

Gérard Manset, Matrice


La scène francophone (des pas morts ou des pas encore morts) est très riche : Deportivo, Jacques Bertin, Allain Leprest, Matmatah, Jean "Dead Wolf" Leclerc, Jean Louis Murat, Arnaud Le Gouëfflec, Loïc Lantoine, Bernard Lavilliers, Thomas Winter et Bogue, Magyd Cherfi, Yves Jamait, Gérard Manset, Capdevielle (qui a sorti un bon album en 2007 passé inaperçu), Al, Dan Bigras, Ridan, Ny:na Valès, Démago (même si là je reste mitigé cochon d'Inde il se passe quelque chose)... Romain Dudek, Alexis HK, Miossec, Nosfell, Pierre Lapointe, Boeuf...

Sûrement, l'écoute de chanson française et francophone demande une réadaptation des oreilles et une remise en cause des schémas neuronaux tracés par l'écoute répétitive de musique anglo-saxonne...

Jean Louis Murat, Caillou